UNE PRESENTATION GENERALE
Par Marie-Luce COLATRELLA <
luce@lptl.jussieu.fr>

Sur le modèle de votre "présentation générale" des Confessions (qui avait beaucoup plu à mes élèves), j'ai préparé une présentation des Châtiments, avec des rubriques un peu différentes.

 SOMMAIRE

 1 - Un siècle de bouleversements
 2 - Éléments de biographie. La carrière politique de Victor Hugo.
 3 -
La genèse du recueil
 4 -
La structure du recueil et le sens des titres
 5 -
La satire
 6 -
Variété des tons dans Les Châtiments
 7 -
Quelques traits caractéristiques de l'écriture hugolienne
 8 -
Le rapport à l'Histoire
 9 -
La mythologie hugolienne
10 - Le personnage du poète
11 - L'engagement de l'écrivain

Bibliographie

1. UN SIECLE DE BOULEVERSEMENTS

Le XIXe siècle est une période variée, qui connut plusieurs régimes. Pour comprendre l'évolution politique de Victor Hugo, et la valeur symbolique de certaines dates, il importe de bien situer les différents courants de cette époque.

* Le 2 déc 1804 : 1er Empire : Napoléon 1er prend tous les pouvoirs. (le 2 dec est aussi la date de la victoire d'Austerlitz)
* 1815 : Restauration : Louis XVIII roi modéré frère de Louis XVI instaure une monarchie constitutionnelle.
* 1824 : Restauration : Charles X succède à son frère Louis XVIII, mais c'est un roi «ultra» conservateur dont l'extrémisme provoque la Révolution de juillet 1830. C'est la fin du règne des Bourbons. La branche cadette des Orléans prend la relève.
* 1830 : Monarchie de Juillet : Louis Philippe, fils de Philippe Egalité (qui avait voté la mort de Louis XVI) prend le pouvoir. Son règne s'achève en 1848 lors d'une nouvelle révolution qui amène la République.
* 1848 : 2de République Hugo et Louis Napoléon bonaparte sont députés 2 dec 1851 : Coup d'état de Louis Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon 1er. Il devient l'empereur Napoléon III. 1870 : guerre contre les Prussiens, chute de l'Empire, 3ème République.

Quelques courants politiques du XIXe siècle:

Légitimiste : de droite pour les Bourbons
Orléaniste : pour les Orléans
Libéral : plutôt de gauche
Bonapartiste : pour l'Empire
Républicain : très à gauche
Socialiste : « rouge » l'extrème gauche de l'époque
Du parti de l'ordre : à droite sous N III
Du parti du mouvement : à gauche sous N III

 

2. ELEMENTS DE BIOGRAPHIE . LA CARRIERE POLITIQUE DE VICTOR HUGO

Comment un conservateur devient un homme de gauche.

Victor Hugo est né en 1802 à Besançon d'un père Colonel, puis général d'Empire (ce point est important car Hugo révérait son père et à travers lui, l'armée napoléonnienne.), Léopold Hugo. Le jeune Victor est un élève doué qui prépare l'Ecole polytechnique au lycée Louis le Grand. Mais sa vocation poétique s'éveille tôt : dès quinze ans, il reçoit un prix de l'académie française. A 17 ans, il écrit son premier roman et fonde avec ses frères Abel et Eugène une revue, Le Conservateur littéraire. Il affirme alors «Je veux âtre Châteaubriand ou rien».

En 1822, il épouse Adèle Foucher dont il était amoureux depuis son adolescence. Elle lui donnera cinq enfants : Léopold (mort à trois mois), Léopoldine (1824) Charles (1827) Victor (1828) et Adèle (1830). Fervent monarchiste comme sa mère, Hugo reçoit la légion d'Honneur à 23 ans.

Mais un événement provoque un revirement dans ses convictions politiques : à une soirée donnée à l'ambassade d'Autriche, l'huissier annonce l'entrée des maréchaux de Napoléon 1er Soult, Mortier et Macdonald en omettant volontairement leurs titres de duc donnés par Napoléon. Le scandale est énorme. Hugo réagit comme si on avait insulté son père, comte d'Empire. Il rallie progressivement l'opposition au régime, le camp des libéraux et des orléanistes.

Au même moment, en publiant la Préface de Cromwell, il devient chef de file des romantiques, considérés comme des révolutionnaitres en littérature (puisqu'ils s'opposent au classicisme). En 1830, c'est la bataille d'Hernani et la Révolution de Juillet. Hugo participe peu à ces bouleversements; il écrit alors un roman historique (c'est la mode) : Notre dame de Paris qui obtient un succès extraordinaire en 1831.

Le nouveau roi, Louis-Philippe, allège la censure. La célébrité d'Hugo ne cesse de grandir. Il publie plusieurs recueils de poèmes et fait jouer des drames. En 1841, il est reçu à l'Académie française. Mais sa fille Léopoldine meurt accidentellement en 1843. Hugo est désespéré et compense cette peine en redoublant d'activité dans la vie publique. Il devient en 1845 directeur de l'Académie française, puis Louis-Philippe le nomme Pair de France (titre nobiliaire qui lui permet de siéger à la chambre des pairs, une assemblée assez conservatrice comme le Sénat aujourd'hui). Dès lors, Hugo entame une carrière politique. Il met à profit son éloquence pour défendre ses idées : l'abolition de la peine de mort, la lutte contre la pauvreté du peuple. Ses discours « de gauche » surprennent son entourage.

Mais en 48, une grave crise économique fait éclater une nouvelle révolution : Louis-Philippe abdique et Hugo descend sur les barricades pour tenter de convaincre les révolutionnaires que la meilleure solution pour la France serait la régence de la duchesse d'Orléans. En vain. Cependant, Hugo est élu député de l'Assemblée constituante (sur une liste de droite) à côté de Louis-Napoléon Bonaparte revenu d'exil. Le poète pense un moment que le prince Napoléon (auteur d'un livre : L'Extinction du paupérisme ) représente une bonne solution pour rétablir l'ordre. Il milite pour son élection à la présidence de la République dans le journal qu'il a fondé avec ses fils L'événement. Après l'élection du Prince-Président, Hugo aspire à siéger dans les conseils du gouvernement et brigue le portefeuille ministériel de l'instruction publique.. Mais Louis-Napoléon l'écarte et Hugo passe à l'opposition, d'autant plus qu'il prévoit le coup d'Etat. Le 17 juillet 1851, il dénonce le cléricalisme du nouveau gouvernement et les ambitions dictatoriales de « Napoléon-le-Petit ». C'est le début d'une lutte dont les Châtiments seront l'aboutissement.

Le 2 décembre 1851, il tente d'organiser une résistance au coup d'Etat, mais le peuple de Paris, lassé des barricades et des massacres, ne le suit pas. Le 4 décembre, tout espoir s'écroule, les troupes ont ouvert le feu sur la foule sans soulever de révolte. Hugo, muni d'un faux passeport, prend le train pour Bruxelles. le 21 décembre par plébiscite (sorte de référendum) le peuple approuve le coup d'Etat. Le 9 janvier 1852, Hugo est expulsé de France « pour cause de sûreté générale ». Il se donne pour première tâche une lutte contre l'usurpateur et rédige le récit des événements intitulé L'histoire d'un Crime. Mais les éditeurs londoniens n'osent pas le publier. Hugo écrit alors Napoléon-le-Petit. qui parait à Londres le 5 août. Il s'embarque pour l'île Jersey où il écrit les Châtiments. Mais en 1855 le gouverneur de l'Ile expulse Victor Hugo qui s'installe à Guernesey.

En 1859, il refuse avec dédain l'amnistie accordée par Napoléon III : « Quand la liberté rentrera, je rentrerai ». Il ne rentrera que le 5 septembre 1870 après la défaite de Sedan et la proclamation de la 3ème République.

 

3. LA GENESE DES CHATIMENTS

 

En 1850, Hugo n'a pas encore l'idée des Châtiments, mais il écrit déjà certains poèmes qui trouveront place dans le recueil « O Drapeau de Wagram », « A des journalistes en robe courte » ou « Un autre». Après le coup d'état, c'est en prose qu'il pense combattre le régime. Dans le pamphlet Napoléon-le-Petit, publié le 5 août, les différents personnages des Châtiments, Dieu, le peuple et Napoléon sont déjà présents, mais il reste à Hugo à découvrir le personnage du poète seul sur son rocher, face à l'océan. Cependant Hugo songe à publier Les Contemplations qui comprendraient une partie consacrée au passé et « un deuxième volume : Aujourd'hui, flagellation de tous ces drôles et du drôle en chef ». Ce volume devient indépendant; Hugo annonce à son éditeur Hetzel 1600 vers dont le titre serait Les Vengeresses. En novembre 1852, il écrit « Nox », puis « l'Expiation » et « Lux » en décembre : l'architecture du recueil est trouvée; le titre définitif, « Châtiments » est choisi en janvier 1853. Mais Le 24 novembre le recueil est publié en deux éditions, l'une expurgée, avec l'indication : « Bruxelles, Henri Samuel », l'autre complète, sans nom d'éditeur et avec la mention : « Genève et New-York ». C'est un très petit format in 32° (plus petit qu'un livre de poche) destiné à faciliter la circulation de l'ouvrage. On se l'arrache.

 

4. LA STRUCTURE DU RECUEIL ET LE SENS DES TITRES

(voir Présentation p. 41 à 44)

Ce recueil, le cinquième écrit par Hugo a deux caractéristiques originales : il est le premier à être aussi bien structuré, et c'est un écrit engagé composé de poèmes satiriques. Entre Nox (le passé, la nuit du coup d'Etat, la dictature) et Lux (le futur, la lumière attendue de la Liberté, l'amour), 98 poèmes sont distribués en 7 livres dont les 6 premiers portent pour titres ironiques les principales fiertés du régime impérial : « la société est sauvée », « l'ordre est rétabli », « La famille est restaurée », « La religion est glorifiée » « l'autorité est sacrée », « La stabilité est assurée ». Le septième «Les sauveurs se sauveront» joue sur les mots pour résumer toute l'espérance de Hugo voué à anéantir Napoléon par la magie de sa parole. Le titre a deux sens : 1° les faux sauveurs seront chassés, 2° ils échapperont à la mort puisque la peine de mort sera abolie. Au centre du recueil, un poème fondamental « L'expiation » (V,13): dont le titre permet de comprendre l'idée d'Hugo : selon lui Napoléon 1er avait commis une faute en prenant le pouvoir par le coup d'Etat du 18 Brumaire. Le régime de Napoléon III est un châtiment tardif envoyé par Dieu; Le titre désigne aussi les sanctions poétiques infligées par le poète à l'usurpateur. «Ces vers ont un double but écrit Hugo en mars 1853, châtier dès à présent les coupables régnants et empêcher dans l'avenir toute représaille sanglante »

A l'intérieur des sept livres, la progression est moins ordonnée mais tout aussi réfléchie. Au grand mouvement de la nuit vers la lumière Hugo en superpose deux autres : le retour obstiné des mêmes thèmes (certains poèmes portent le même titre, d'autres traitent du même sujet sur un mode différent) et la variation locale qui juxtapose des pièces de ton différent, les mettant en valeur les unes par rapport aux autres.

Hugo a conscience de la monotonie que pourraient créer 6200 vers écrits sur le même ton et multiplie les alternances entre poèmes graves et légers. D'autre part, des échos significatifs unissent les poèmes entre eux.

 

5. LA SATIRE

(voir Dossier dans l'édition GF p. 400 à 418)

Ce mot (sans « Y ») vient du latin « satura » qui signifiait « macédoine » (mot polysémique comme «farce» en français)

1. Dans l'antiquité latine, la satire désignait un ouvrage où se mêlaient les vers et la prose et qui avait pour objectif de critiquer en les tournant en ridicule les vices, les passions déréglées, les sottises des hommes, les abus de pouvoir etc...

2. A partir du XVIIe siècle : poème à rimes plates, descriptif et oratoire qui s'attaque aux défauts littéraires, moraux, politiques ou simplement à des individus, la plupart du temps en les nommant.

Rapide histoire du genre : La satire est d'origine latine bien qu'on en trouve quelques exemples dans la littérature grecque. Horace et Juvénal la cultivent avec succès. Au Moyen-âge, elle prend la forme des fabliaux ou des romans comme Le Roman de Renard. Elle poursuit sa route à la Renaissance, en prose chez Rabelais et en vers dans Les Regrets de du Bellay (sonnet 109) ou Les Tragiques d'Agrippa d'Aubigné. Au XVIIè siècle, chez Regnier et Boileau, la satire devient un poème littéraire en alexandrins. Voltaire imite au XVIIIè siècle cette forme classique. (Le Mondain). Chez André Chénier à la fin du XVIIIe siècle , la satire prend la forme des ïambes (alternance d'alexandrins et d'octosyllabes à rimes croisées). Très sensible à l'art de Chénier, Hugo imite parfois cette formes. Cependant, s'il s'inscrit dans une certaine tradition, il renouvelle aussi dans les Châtiments le genre de la satire :

La tradition :

* Le « mélange » caractéristique de ce genre est manifeste dans l'oeuvre de Hugo à deux titres : le mélange des tons (épopée, chanson, sarcasme etc...) et la variété des formes poétiques (types de strophes et de mètres).
* La fantaisie apparaît dans les jeux de mots, les dialogues, les allégories ingénieuses (« Le porc sénat fouillant l'ordure du groin » IV, 13)

Le renouvellement :

* La structure :pour la 1ère fois, un ouvrage de poésie non narrative n'est pas un recueil mais un ensemble préconçu.
* Cette organisation à plusieurs étages ne vise pas à exposer ni à démontrer mais à produire un effet chez le lecteur.
* Hugo ambitionne pour la première fois d'inclure dans un poème la totalité du réel : l'univers entier est convoqué au procès de Napoléon III.

 

6. LA VARIETE DES TONS

Victor Hugo recourt à toutes les formes de poésie : il passe couramment de l'injure à la prophétie, de la chanson à la fresque historique.

* La Chanson. Hugo admirait le poète Béranger, auteur de chansons célèbres. Il pensait à juste titre que la chanson permettait de toucher le peuple. Les Châtiments comportent donc 12 chansons qui détendent par leur forme légère.

* L'invective ad hominem. Souvent le poète attaque nommément des hommes proches de Napoléon III, n'épargnant aucune injure dans une grande violence verbale. (« Dansez! dansez, Berger, d'Hautpoul, Murat, citrouilles. » VI,5)

* L'épopée : de vastes ensembles magistralement composés exaltent l'imagination et atteignent la dimension d'un tableau d'histoire : « L'Expiation » (V,13) ou « A l'Obéissance passive » (II,7).

* La vision prophétique : Dans la dernière partie du recueil, le poète se tourne vers l'avenir et représente ses rêves par des symboles : guidé par la clarté de l'Idée (« Luna », il voit dans l'étoile du matin la messagère de la liberté (« Stella » et contemple la « vision sublime » des temps futurs (« Lux »)

 

 7. QUELQUES TRAITS CARACTERISTIQUES DE L'ECRITURE HUGOLIENNE

 

NB: les liens de cette rubrique renvoient au Lexique des études littéraires.

* L'art oratoire : A l'opposé du poème lyrique qui accorde une place prépondérante à la première personne et à l'expression des sentiments, le poème oratoire privilégie la deuxième ou la troisième personne. Hugo met en scène les destinataires qu'il attaque. Le poète n'hésite pas à apostropher ses adversaires. Le style oratoire se caractérise aussi par le travail du rythme et les parallélismes syntaxiques, l'abondance des figures de style, périphrases, hyperboles et antithèses, l'importance du lexique relevant de la morale.

* L'antithèse et le manichéisme : Hugo pense le monde en terme d'oppositions (Nox‚Lux)

* L'emphase et ses différentes formes et notamment l'hyperbole :(« Contre toutes les Tyrs et toutes les Sodomes [...] ils allaient » II,7 « A l'obéissance passive ») Certains l'ont critiquée, parlant d'outrance et de grandiloquence.

* La recherche verbale et les amalgames Par des associations de mots nommées aussi « métaphores maxima » des individu deviennent des allégories vivantes comme Napoléon III « Homme-sépulcre » dans « Le parti du crime » VI, 11.

 

 8. LE RAPPORT A L'HISTOIRE

 

Hugo adopte-t-il le point de vue d'un historien? Certes, les Châtiments représentent un témoignage par rapport au coup d'Etat de 1851. C'est une oeuvre qui comprend de nombreuses références à deux périodes historiques : le règne de Napoléon 1er (« l'Expiation » et l'ascension de Louis-Napoléon Bonaparte. Le poète mentionne des événements précis (« Souvenir de la nuit du 4 ») ou des personnages ayant joué un rôle dans l'entourage de Napoléon III. L'Histoire récente est donc un thème fondamental de l'oeuvre, ce dont Hugo est conscient : « J'ai mis des verrous à l'histoire, l'histoire est un bagne aujourd'hui » De plus Victor Hugo donne dans cette oeuvre une interprétation personnelle des événements lorsqu'il considère que le règne de Napoléon III est un châtiment des crimes accomplis par son oncle. Il pense aussi que l'histoire à un sens, qu'elle évolue vers un progrès qui se traduira par l'avènement de la République et la fin des massacres. Comme un historien d'aujourd'hui, Hugo ne se contente pas d'énumérer des faits. Cependant, par plusieurs caractéristiques, cette oeuvre dépasse le cadre de l'Histoire.

* Le point de vue du poète est plus subjectif qu'objectif, il privilégie l'invective alors qu'un historien s'attache à l'exactitude des faits en s'abstenant de juger. On a ainsi reproché à Hugo d'avoir fait de Napoléon III un tyran sanguinaire, ce qu'il n'était pas dans la réalité.

* La poésie modifie les événements qu'elle décrit. Elle les réorganise, les met en mots, en images qui n'ont parfois rien à voir avec la réalité. Le poète par ces images (les références à Néron, à la Saint Barthélémy, à Babylone) cherche à exprimer une vérité qui s'éloigne parfois de la réalité historique.

* La partie prophétique des Châtiments dépasse largement le cadre de l'Histoire, science du passé.

 

9. LA MYTHOLOGIE HUGOLIENNE

 

Plus qu'un historien, Hugo apparaît comme un créateur de mythes :

* D'une part, il confère à ses personnages une dimension symbolique. L'avocat Troplong devient ainsi le représentant de la corruption sous Napoléon III alors que les soldats de l'an II incarnent la liberté de la République.

* Pour rendre plus sensible cette dimension, il fait référence à des figures mythiques ou religieuses déjà connues, à des passages de la bible (VII,1 « sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée ! »)

* D'autre part, il donne aux événements une dimension cosmique en faisant intervenir Dieu. et le diable (« Un jour Dieu sur sa table / Jouait avec le diable » V,2).

* Enfin, le récit poétique est au service de l'expression d'une idée philosophique : l'accession à la liberté par le châtiment du tyran et l'avènement de la République.

 

10. LE PERSONNAGE DU POETE

Dans les Châtiments, Hugo s'est lui-même représenté en personnage mythique : le poète proscrit, isolé face à l'Océan (image du peuple)
« [...] moi qui vis au bord du gouffre amer,
         Sur les rocs centenaires,
Moi qui passe mes jours à contempler la mer
         Pleine de sourds tonnerres! »

Il se décrit aussi comme un prophète, dont la parole est la voix de Dieu, le verbe sacré :

« Ce crime qui triomphe est fumée et mensonge;
Voilà ce que je puis affirmer, moi qui songe
L'oeil fixé sur les cieux! »
(« Lux »)

En effet, selon Hugo, le poète est un visionnaire; plus sensible que les autres hommes, et donc capable de les guider.

« Peuples ! écoutez le poète !
Écoutez le rêveur sacré !
Dans votre nuit, sans lui complète,
Lui seul a le front éclairé.
Des temps futurs perçant les ombres,
Lui seul distingue en leurs flancs sombres
Le germe qui n'est pas éclos. »
«Fonction du poète»

 

11. L'ENGAGEMENT DE L'ECRIVAIN

On nomme engagement l'attitude de celui qui pense que l'art doit servir les hommes par une participation directe de l'écrivain aux problèmes de son temps. L'écrivain engagé est donc actif dans son époque, et son oeuvre a pour lui une utilité immédiate. A l'opposé, les écrivains de « l'art pour l'art » récusent cette attitude. Les polémistes comme Agrippa d'Aubigné, Voltaire, Chénier ou Hugo sont des écrivains engagés : souvent, ils participent physiquement aux conflits de leur époque (Hugo descend sur les barricades, Agrippa d'Aubigné combat dans les guerres de religion etc...). De plus, ils mettent leur art au service d'idées sur lesquelles ils cherchent à éclairer l'opinion (telle est la fonction des Châtiments) et traitent de problèmes actuels dans leurs oeuvres : la peine de mort par exemple.

 

BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES AYANT SERVI A RÉDIGER CETTE NOTICE: